文摘
L’activité de prévention en santé au travail, comme dans d’autres domaines de la prévention, mobilise une série de connaissances sans lesquelles, il lui serait difficile d’agir. Parmi les domaines de connaissances empruntés par la prévention, l’épidémiologie occupe une place centrale. Discipline de naissance relativement récente, elle a développé un ensemble de techniques de mesures et d’évaluation (enquête cas témoins, biomarqueurs, suivi de cohortes, etc.) lui permettant de bâtir un tableau relativement précis dans certains domaines de formes d’exposition aux risques. Mobilisant l’outil statistique, elle parvient ainsi à « objectiver » des facteurs de risque dans des contextes de travail précis. La présente intervention se propose d’aborder la question de l’appropriation de connaissances épidémiologiques par « les préventeurs ». Au-delà des controverses propres à un champ de connaissances, ici l’épidémiologie en santé et travail. En effet, la période récente se caractérise par une circulation de l’information des résultats des études. Certains organismes (INRS, Dares, etc.) participent à cette fonction de circulation dans l’objectif de favoriser l’usage de connaissances. C’est ainsi que les médecins du travail, les conseillers préventions, les contrôleurs prévention et autres professionnels du secteur de la prévention vont prendre connaissance – ou pas – de ces résultats. Il s’agira d’entrer dans l’activité de travail de prévention pour observer comment ces professionnels s’approprient ces connaissances. L’observation a discerné trois effets induits par le processus d’appropriation. Un premier « effet normatif » (cf. Peretti-Watel et Moatti, 2009), un second effet que nous qualifions de « créatif » inspiré de travaux de D. Cru (2014) et enfin, un troisième effet que nous qualifions « d’incertitude et d’incomplétude ». Ces trois effets ne sont pas attachés à des catégories de personnes nécessairement mais ils illustrent les épreuves auxquels sont confrontées les préventeurs et posent la question du travail entre les chercheurs producteurs de connaissances et les professionnels chargés d’opérationnaliser ces dernières.